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Soundtrack

L’histoire
Fin du XXe siècle. Deux enfants, un garçon et une fille, se retrouvent échoués sur une île déserte dans le Pacifique. En deux années, ils développent des techniques de survie et de communion avec la nature, proches du chamanisme. Devenus grands et rendus à la civilisation, ils découvrent un Tokyo transformé par le réchauffement climatique et l’immigration clandestine. Envahi par une végétation tropicale et des colonies de corbeaux à gros bec. Où il vont devoir apprendre à survivre, sur les décombres de la société des hommes.

Mon avis
Soundtrack signifie en anglais « bande son ». Alors, parlons musique. Soundtrack est difficile à lire, comme la portée d’une oeuvre classique. Bien que le langage employé soit facile à décrypter, nous avons là du haut niveau dans le rythme de la partition, quelque chose d’inhabituel, qu’on n’entend pas sur les grandes ondes. Soundtrack, c’est parfois du rock, des solos de guitare violents, dignes du plus grand groupe de metal du monde. Soundtrack, c’est parfois un air plus doux, une petite mélodie de musique classique, nostalgique, que l’on fredonne gaiement. Soundtrack fait alors dans tous les genres et va partout. Mais Soundtrack a principalement des airs de morceau expérimental avec toute l’instabilité qui en découle et perturbe l’auditeur.  Le chef d’orchestre est alors parfois difficile à suivre. Bien que Touta et Hitsujiko soient d’abord le duo mis au devant de la scène, les autres musiciens sont très présents (la maman qui les a adoptés, leur professeur, la femme de ce dernier, etc). Le compositeur leur dédie, à chacun, une oeuvre complète, un opus. Mais le rythme de Soundtrack est lourd. Une oeuvre en quatre temps ? En trois temps ? Difficile de le trouver finalement et bien que j’aie tendu l’oreille, je n’ai pas réussi à comprendre cette pièce. Le compositeur oublie parfois de nous emmener avec lui. Il tombe parfois dans une transe ou dans une cession d’improvisation, pleine de spontanéité, qu’il est alors difficile d’aborder. Ne comptez pas prendre non plus le morceau en cours de route ; c’est perturbant et il est encore plus difficile de prendre le rythme alors. J’ai essayé de danser avec la musique de ce compositeur japonais ; j’ai essayé de chanter avec lui. Mais lorsque je pensais pouvoir saisir les personnages, ils m’échappaient à nouveau pour entamer une toute autre mélodie peu efficace pour m’accrocher sur la page suivante.

Il percevait les unités sonores, mais pas leur continuité temporelle. Il ne saisissait pas non plus la combinaison simultanée de plusieurs émissions de sons, autrement dit, l’harmonie. Il ne déduisait donc aucune émotion, ni de l’harmonie, ni de la mélodie. Il n’était pas touché par la beauté, ni la violence, ni la lascivité sexuelle de ce qu’il entendait. Shunichi, qui cherchait à déterminer la frontière entre musique et non-musique pour Touta, s’était pris dans la figure en retour le fait que pour lui tout était non-musique. Dans l’esprit de ce garçon, à l’intérieur de sa sensibilité, la musique avait fait naufrage et était radicalement scellée. La musique était morte.

Ma note
J’accorde ★ ☆ ☆ ☆ ☆ à Soundtrack. La citation ci-dessus reflète complètement mon ressenti face à ce roman indomptable. J’ai appuyé, bien malgré moi, sur le bouton « stop » sans même venir à bout de la chanson. Alors ne vous attardez pas trop sur ma critique ; prenez-la avec des pincettes. Ca ne m’arrive pas souvent d’interrompre un morceau au beau milieu et je n’en suis pas fière. Mon oreille n’est sans doute pas habituée à ce haut niveau de littérature. De plus, le japonais reste une langue difficile à traduire ; la traduction a l’air de peser parfois lourd sur la portée. Clé de sol ou clé de fa, je n’avais pas les outils pour pouvoir profiter pleinement de Soundtrack. J’écouterai à nouveau ce morceau d’ici quelques temps, lorsque mes oreilles se seront faites à de la musique plus pointue, moins commerciale, moins facile. Car comme l’oeuvre la plus connue des plus grands compositeurs classiques, Soundtrack vaut le coup d’être entendu.

A savoir
J’ai lu Soundtrack dans le cadre de l’édition Masse Critique de septembre 2015 organisée par Babelio. Je remercie Babelio et les Editions Philippe Picquier pour cette découverte intrigante et particulière qui m’a donné du fil à retordre, et qui m’en donnera encore. Mais parfois, il est bon d’avoir entre ses mains, un roman qu’il faut savoir apprivoiser pour l’assagir avant qu’il ne glisse entre vos mains et s’enfuie avec les personnages et leur destin.

ISBN : 9782809711103
Lu en français.

4 commentaires sur “Soundtrack

  1. J’apprécie beaucoup votre article. De tout ce que j’ai lu à ce jour sur internet à propos de Soundtrack, votre critique est la plus fine, la plus pertinente, et la plus habitée. Votre jugement est négatif au final ? Et alors, quelle importance ? Un auteur qui provoque des réactions aussi justes ne peut être que fier d’avoir trouvé un si bon lecteur.

    1. Merci beaucoup Patokichi pour votre commentaire ! (Félicitations, vous êtes le premier visiteur à laisser un commentaire ! *musique festive, confettis, danses et colliers de fleurs*) Effectivement, mon avis est plutôt négatif mais quand on sait le travail conséquent que représente la rédaction d’un roman pareil, on s’en veut presque de ne pas aimer le lire ; alors on se trouve une bonne excuse : ici, c’est juste que je n’étais pas entraînée, je pense.

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